Journaliers et largement répandus à la maternelle, les ateliers sont de moins en moins présents en école élémentaire. Personnellement, je les utilise le plus possible et je vous explique pourquoi.
L’intérêt des ateliers
Je vois de nombreux avantages à travailler en ateliers:
- Les élèves sont beaucoup plus actifs et donc plus impliqués dans les apprentissages.
- La différenciation selon les élèves est plus aisée, d’abord parce qu’on peut choisir la constitution des groupes en fonction des besoins, ensuite parce que le groupe soutenu par l’enseignant est plus restreint et donc l’enseignement est plus efficace.
- De même, les élèves en grande réussite trouvent plus facilement leur compte dans un travail différencié en ateliers qu’en groupe classe.
- Les élèves acquièrent des compétences transversales comme l’autonomie, l’entraide, le travail en groupe, la responsabilité…
- Le travail en atelier facilite l’organisation des cours multiples.
- Ils sont également applicables dans les classes en co-intervention en REP et REP+.
- L’intégration d’une AESH pour un élève est améliorée, elle peut même aider à gérer l’atelier auquel participe son élève.
- Le besoin en matériel est réduit (pour un travail de manipulation par exemple) puisqu’on doit rassembler le matériel pour quelques élèves seulement au lieu de toute une classe. Je pense même qu’en atelier, on peut se permettre des activités que l’on n’oserait pas en groupe classe.
- L’utilisation de jeux (du commerce ou fabriqués) nécessite forcément de passer par des ateliers.
- Le retour sur le travail des groupes lors d’un mise en commun est très enrichissant.
Alors convaincu ou je continue la liste ?…
Quelques inconvénients
Oui effectivement, sinon ce ne sera pas drôle ! Plutôt qu’inconvénient on pourrait d’ailleurs juste évoquer quelques obstacles facilement surmontables. Et puis certains préjugés sur les ateliers ne sont à mon sens pas justifiés.
- D’abord le niveau sonore: oui les élèves actifs font plus de bruit, mais normalement c’est du bruit “sain” parce qu’ils débattent, s’organisent, se déplacent parfois, manipulent du matériel… Il faut bien établir les règles dès le départ en insistant sur les besoins de calme des autres élèves. On peut par exemple nommer un responsable du bruit dans chaque atelier.
- L’organisation: alors oui, les ateliers nécessitent une bonne organisation, que ce soit pour les préparer, pour déterminer les groupes ou pour en effectuer le suivi. Mais comme tout, l’organisation s’apprend et s’améliore à force d’utilisation (voir conseils ci-après)
- Chronophage les ateliers? Je ne pense pas car quand les ateliers sont prêts, ils vont tourner sur plusieurs séances.
- Des tonnes de matériel et de photocopies? Mais non puisque, comme je l’ai dit plus haut, on ne prépare que pour un groupe. En ce qui concerne les photocopies, mon avis est simple: moins on en fait, mieux c’est ! Je préfère des fiches plastifiées et effaçables après correction ou des travaux de manipulation. Oui effectivement il n’y aura pas forcément de trace papier de ce qui aura été fait, et alors ? Ca finit toujours à la poubelle de toutes façons….
- Certains élèves ont du mal avec les ateliers ? Comme pour le reste, ça s’apprend. D’autant qu’ils ne sont pas toujours en autonomie et qu’ils vont progresser en s’inspirant des autres.
- Certains élèves ne font rien ou jouent ? Après des années d’ateliers, je n’ai jamais vu d’élèves ne rien faire du tout. Ils sont plus lents, rechignent à certains travaux qu’ils n’aiment pas (comme tout le monde !) mais avancent tout de même. Chacun connaît les élèves qu’il faut aller relancer ou recadrer de temps à autre.
- Certains élèves copient lorsqu’ils sont en autonomie ? Personnellement je ne fais pas de fixation là-dessus. L’élève qui copie apprend tout de même quelque chose, il en a peut-être besoin pour avoir confiance en lui, parfois il ne fait même que vérifier s’il a bien compris. En atelier, je dirais même qu’il y a moins de copie puisque les élèves ne font pas tous la même chose. Quand ils sont en groupes de niveau, ils peuvent difficilement copier puisque les voisins sont également parfois en difficulté. Quand ils sont en groupes homogènes, le but est justement qu’ils s’entraînent et s’entraident.
Alors, rassuré ? Bon alors allons voir en détails comment organiser ces ateliers.
Organiser les ateliers
Le temps
Je suis persuadée que les moments d’ateliers doivent être dans l’emploi du temps. On ne peut pas décider de temps en temps de faire un atelier car cela nécessite un apprentissage des élèves et un suivi.
C’est pourquoi je commence dès la première semaine.
Il faut nécessairement plusieurs temps d’atelier dans la semaine pour pouvoir effectuer la rotation. Si vous avez 4 groupes par exemple, il est impensable de tourner sur 4 semaines ! Au moins deux créneaux dans la semaine est un minimum. Je n’ai jamais réussi à dépasser 2 séances par jour car il faut également caser les séances collectives, le sport, la musique, la BCD, jongler avec des décloisonnements, des prises en charge …
En durée je prévois soit des séances de 45 minutes, soit des séances d’une heure avec une rotation au bout de 30 minutes. Il faut également penser au temps d’instructions collectives (qui n’a lieu normalement qu’au début de la première rotation) et de rangement (qui va très vite car les élèves sont responsables du rangement de leur atelier).
Pour éviter le cafouillage de fin de séance (bavardage, agitation, “maîtresse, maîtresse, maîtresse!”…), il est nécessaire que les élèves sachent quoi faire s’ils ont terminé leur atelier avant le temps imparti, et pour les lents qu’ils soient prévenus un peu avant que le temps est presque terminé. Vous pouvez prévoir un timbre collectif éventuellement.
L’espace
Si on doit réorganiser l’espace plusieurs fois par jour pour mettre en place des ateliers, trop de temps sera perdu. Et même si vous avez déjà organisé votre classe en tables de 4 ou 6, cela ne correspondra pas toujours aux ateliers que vous voudrez mettre en place.
Je préfère jongler entre différentes sortes d’ateliers:
- les ateliers collectifs (manipulation par exemple) qui nécessitent une grande table. Pour cela, j’ai toujours un îlot de 4 tables au fond de ma classe. Mais on peut également utiliser d’autres espaces: le couloir, un petit local contigu genre atelier.
- les ateliers à deux (jeu à deux, s’interroger à deux…) pour lesquels il suffit de tourner une chaise pour mettre les élèves face à face.
- les ateliers sans interaction: les élèves peuvent alors rester à la même place ou se déplacer sur une autre table.
- les ateliers avec l’enseignant: souvent je les regroupe près du tableau pour avoir un support de travail ou alors dans un coin regroupement si vous en avez un.
Au final, il n’y a pas tant de manipulation de tables à faire. Ce sont surtout les élèves qui se déplacent.
Quels ateliers ?
C’est l’intérêt des ateliers: en fonction de vos besoins !
Mais il faut également que des ateliers soient en totale autonomie et réfléchir au rôle de l’enseignant. Par exemple certains travaux seront en semi-autonomie et ne nécessitent qu’une relance de temps à autre, alors que parfois un des ateliers sera entièrement géré par l’enseignant car c’est un nouvel apprentissage.
Je prévois en général:
- un atelier individuel calme et autonome: copie de poésie, travail sur les ceintures (voir article), plan de travail individuel, fichiers (MHM par exemple), exercices… La consigne doit être très claire pour les élèves, elle peut être écrite quelque part, et les élèves doivent savoir où se tourner en cas de blocage (entraide, affiches, cahier outils…)
- un atelier collectif avec matériel: manipulation, jeu de société, arts plastiques… Le matériel doit alors avoir été préparé en amont.
- un atelier avec l’enseignant: soit une régulation pour revoir une difficulté rencontrée par un groupe d’élèves, soit un apprentissage qui nécessite un travail en petit groupes (par exemple manipulation du compas)
- souvent un atelier de manipulation / jeu individuel avec des cartes à pinces autocorrectives par exemple.
- c’est également le moment de caser un travail en informatique si vous avez la chance d’avoir un ou deux ordinateurs dans la classe ou des ordinateurs école mobiles.
Parfois je prévois également 4 ou 5 ateliers individuels affichés au tableau et les élèves les font dans l’ordre qui leur plaît. Quand ils ont terminé un travail, ils viennent cocher au tableau leur nom dans la colonne de l’atelier et passent au suivant. Moi, je passe aider, valider, corriger…
En cours multiple, je prévois parfois des ateliers par niveau de classe mais parfois aussi des ateliers mixtes pour que les élèves ne soient pas toujours avec les mêmes camarades. Et même il m’arrive de prévoir des ateliers gérés par un élève (du niveau supérieur mais pas forcément).
Une année, j’ai eu la chance de fonctionner en symbiose (si si on peut dire ça comme ça !) avec une collègue ayant un niveau de classe supérieur. 3 de ses élèves venaient tous les jours 1 heure dans ma classe pour gérer un atelier. Franchement génial ! Ces élèves apprenaient à expliquer, à aider, à être bienveillants, étaient obligés de se mettre au clair avec leurs connaissances. Un beau moment de partage!
Les groupes
Avant l’atelier, il faut surtout organiser les groupes. Certains enseignants aiment tourner avec les mêmes groupes toute l’année. C’est plus facile de s’y retrouver pour l’enseignant et pour les élèves. Mais on peut avoir envie de modifier en fonction des besoins.
Ainsi, pour la régulation, il s’agit forcément de groupes de besoin par rapport une difficulté ciblée. Pour certains apprentissages, il vaut mieux avoir des groupes hétérogènes pour le dynamisme du groupe et pouvoir se concentrer sur les élèves en grande difficulté.
En pratique, je fabrique au début de l’année des étiquettes prénoms plastifiées et aimantées. Je note au tableau le nom des ateliers et je mets les étiquettes des élèves dans la case voulue. A la rotation suivante, je fais tourner les ateliers.
Les instructions
Evidemment, elles doivent être très claires pour que cela fonctionne er que l’enseignant ne sit pas dérangé en permanence ou que des élèves restent sans rien faire.
La première rotation nécessite donc un temps d’explication plus long. Les fois suivantes, un simple rappel devrait suffire sauf si l’enseignant remarque que quelque chose n’a pas été compris la première fois.
Pour faciliter l’organisation, on peut:
- écrire les instructions au tableau ou sur une fiche.
- afficher un exemple ou même en faire un collectivement avant
- prévoir un bac, panière, où déposer les travaux terminés
- préparer les fiches et le matériel par atelier
- prévoir des aides (tutorat, fiche outils, dictionnaire, matériel…)
- prévenir 5 minutes avant la fin des ateliers
- désigner un responsable niveau sonore, rangement.
- tourner au moins une fois dans les ateliers pour vérifier comment ça se passe
Le suivi
Je trouve que c’est un des points délicats du travail en atelier. Il faut vérifier ce qui a été fait et compris pendant les séances.
- En cas de travail individuel sur fiche ou exercices effaçables, c’est évidemment la trace écrite qui sert de vérification.
- En cas de manipulation, on peut passer par la photo ou simplement prendre 5 minutes en fin de séance pour faire le point avec les élèves. Comme toujours avec la manipulation, certains n’auront pas tout compris mais le travail les aura aidé, même en regardant les autres.
- Les jeux sont la plupart du temps autocorrectifs. Parfois il faut passer vérifier en cours de séance que les élèves ont bien compris les règles.
- Pour les ateliers d’apprentissage, un point collectif une fois que tout le monde est passé peut être nécessaire pour institutionnaliser la notion.
- Enfin, l’enseignant doit garder une trace des ateliers effectués par les élèves. Par exemple un simple tables avec le nom des ateliers et une notation du style +, -, tb….
Voilà, après toutes ces consignes un peu longues, passons aux choses sérieuses ! Je vous propose quelques idées d’ateliers mais à vous l’inventivité pour aider au mieux vos élèves. Quand ça marche bien je trouve que le travail en ateliers est un vrai plaisir pour les élèves et l’enseignant.